[ Chronique ] THE ARMED – Ultrapop ( Sargent House )

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Viendra-t-on un jour à bout de l’énigme THE ARMED ou ne serait-ce qu’une vaste blague ( voire une imposture ) à laquelle nous ne devrions pas consacrer autant de temps et d’énergie ? C’est la question que je me suis posé quand le collectif apparemment originaire de Détroit a annoncé la sortie de son quatrième album, « Ultrapop ».

Le groupe semble vouloir depuis ses débuts créer un mystère ou une sorte de culte autour de ses membres, résultant tout un tas de théories fumeuses, avérées, discutées : les membres affichés sur les photos promo ne seraient que façade et le groupe tiendrait en fait en la personne de Kurt Ballou de CONVERGE ainsi que quelques sbires ( rappelons que Ballou reste sur « Ultrapop » crédité comme producteur exécutif ?! ), le groupe pourraient également être l’oeuvre de ANDREW WK, il pourrait être une agence de pub’ ou financé par Tony Hawk ou tout simplement ( et chose la plus probable ) un collectif polymorphe autour duquel gravite nombre de musiciens, artistes ou personnalités.

Cette fois-ci, un peu moins de secrets : le groupe est apparu en pleine lumière sur la première vidéo extraite de l’album et a même annoncé avoir collaboré avec Mark Lanegan, le guitariste de QOTSA Troy Van Leeuwen et Chris Slorach de METZ.

Maintenant, j’ai essayé d’en savoir un peu plus, en me plongeant dans un récent entretien : pourquoi ce revirement dans l’approche ? Pourquoi avoir joué sur l’anonymat ? Quel était le but de créer autant de secret et de culte autour du groupe ? Malheureusement, il n’y a pas vraiment de réponse là-dessus sachant que le gros de l’entretien n’est consacré qu’à l’image une fois de plus. On y parle cross-fit et body-building, régime alimentaire et training etc. Le groupe demande même à ce qu’on arrête de lui parler de ça alors que tout semble marketé pour qu’on ne lui parle que de cela… Faut-il y voir un foutage de gueule du milieu hardcore ? du journalisme ? de tout le monde ? J’aurai préféré entendre parler de processus artistique et finalement de ce qui nous intéresse logiquement le plus : de musique. Alors j’en reviens au même questionnement quel est l’intérêt réel de ce groupe ?

« Ultrapop » se définit en opposition ( un brin grossière ) au terme « Hardcore ». Il reprend cependant les mêmes bases qu’a toujours développé THE ARMED c’est à dire un punk hardcore abrasif, « musculeux », noise et très dense, jouant toujours avec les limites du genre. On y retrouve aisément du CONVERGE et quelques délires math-rock, le tout noyé sous une tonne d’effets et de sons. Un univers toujours aussi intense, exigent et parfois presque « bordélique ». Certains titres sont bons, excitants et déroutants, entraînants plus que jamais ( « All Futures », « A Life So Wonderful », « Big Shell », « An Iteration » ). Le son est massif, impénétrable. Tantôt indus’, tantôt punk, les mélodies alambiquées succèdent à celles plus accessibles, tout comme les voix masculines ou féminines sont extrêmes, hurlées ou mélodiques, vocodées, pop-désincarnées et donc interchangeables à souhait.

Le groupe semble vouloir apporter de la mixité, de la couleur à sa lourdeur, des mélodies, de la culture pop’ pour briser et dé-construire encore un peu plus les codes, les fétiches et le style auquel il se rattache pourtant indéniablement. Et il y arrive plus ou moins en insufflant de la joie dans la violence, de la haine dans la beauté, etc. Tout semble être pris dans une énergie folle et créatrice, imperceptible, sorte de grand marasme-fatras-fourre-tout peuplé d’images ultra-marketées imprimées sur papier glacé : ni triste, ni joyeux, ni laid, ni beau, ni vraiment sale, ni totalement aseptisé, donc un peu gênant pour nous puisque dur à définir.

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Selon lui, THE ARMED veut lutter contre l’attente que l’on a d’un groupe ou d’un style, en cherchant à créer de « nouvelles tensions » et intrigues. Mais en voulant trop sortir des carcans, en voulant trop déstructurer son style et conceptualiser son image, j’ai l’impression que le groupe s’y perd en ne suscitant que cet intérêt artificiel, voire superficiel dont je parlais en préambule.

J’en reviens donc à ma problématique initiale : on en oublie trop souvent de parler et de décortiquer la musique du groupe ( qui au final est intéressante mais pas si bouleversante que ça ), tant on parle multi-médias, line-up, et ci et ça ; sorte de pignolage élitiste pour « gens du milieu » en manque de sensations. À l’inverse, si on le voit comme un tout, comme une oeuvre multi-médias, foutage de gueule général ou mystérieux pied de nez distordu aux sub-genres du metal/punk/hardcore et à la pop’ alors on peut y trouver un peu d’intérêt… La question reste en suspend.

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