[ Chronique ] LACUNA COIL – Sleepless Empire (Century Media Records)

« Sleepless Empire » est déjà le dixème album de LACUNA COIL… Je crois que je ne vois pas le temps filer, ou peut-être que je n’ai pas envie de le voir… Je me rappelle encore la sortie de « Comalies » en 2002, c’était presque hier à mes yeux alors que le quatuor en a fait un remake pour ses vingt ans en 2022. J’avais dans mes souvenirs un LACUNA COIL très gotho-sympho avec même des relents rock un peu mielleux mais ce remake m’a surpris de par la puissance déployée (sans pour autant léser la mélodie), de par la versatilité des voix et les riffs percutants désormais mis en avant. Je me suis donc plongé avec entrain dans ce nouvel opus – bande-son riche et nuancée de notre époque, sombre et symbolique. Cette sauce corsée au metalcore moderne est adoucie par la croisée vocale des bruissements rauques d’Andrea Ferro et des envolées lyriques et puissantes de l’inimitable Cristina Scabbia. Album après album, leur duo n’a de cesse de s’améliorer, jouant sur la profondeur, la continuité, la complicité. Débordante de puissance et de charisme, la voix de Scabbia est devenue centrale et éclatante, elle relève tout, élève tout. Elle nivelle et dénivelle, nous fait parcourir des chemins escarpés, de hautes montagnes et des vallées sombres. 

Ainsi, balloté dans tous les sens, l’album file et on ne s’ennuie pas. Il s’écrit un peu comme un Blockbuster avec ses moments intenses, son émotion, ses scènes d’action et ses money-shots. Et on peut dire que l’album, plus cinématographique que jamais, en est pétri : des grandiloquents « Gravity » ou « Never Dawn », en passant par les plus sombres « Hosting The Shadow » qui voit la participation de Randy Blythe de LAMB OF GOD ou « In Nomine Patris », et même le très rock FM « I Wish You Were Dead » qui reste en tête. Ailleurs, des morceaux comme « Oxygen », « Scarecrow », « Sleepless Empire » et « Sleep Paralysis » font le job en perpétuant fidèlement le swing fougueux des « Delirium » (2016) et « Black Anima » (2019) : guitares et claviers abondent pour mieux mettre en valeur les vocaux de Scabbia et Ferro. Sur ce nouvel album LACUNA COIL semble vouloir nous parler, nous indiquer que dans cette ère numérique, nous errons, prisonniers d’un empire sans sommeil qui dévore nos identités. Notre génération, suspendue entre deux mondes, cherche désespérément à s’ancrer dans une réalité qui s’effiloche. Pourtant, au cœur de ce chaos technologique, une lueur de rébellion scintille encore.

« Sleepless Empire » se veut ainsi une symphonie sombre et envoûtante, une quête d’authenticité – une bande-son de notre époque tissée de textures riches et d’ombres profondes qui nous rappelle que dans ce monde hyper-connecté, l’étincelle de notre humanité persiste, indomptable et éternelle…