image article [ Chronique ] SOLSTAFIR - Hin Helga Kvöl ( Century Media Records )

À chacune de ses sorties, SÓLSTAFIR semble arriver entre chien et loup, non pas au coeur de l’hiver mais plutôt à son commencement, là où les choses se ralentissent, se suspendent – ce moment crépusculaire où les doux rayons du soleil percent encore les nuages ​​sombres. Cet album numéro huit baptisé «  Hin helga kvöl », à travers une collection diversifiée de chansons cousues main par l’éclectisme rocailleux du groupe, capture parfaitement cette essence et agit comme un phare de lumière et d’espoir, solitaire certes, mais extrêmement brillant en ces temps misérables.

À la croisée des chemins entre ses racines black metal et son désir de proposer un rock anthémique, SÓLSTAFIR a produit avec « Hin Helga Kvöl » un album à la fois puissant et mélodieux, sorte de retour aux sources qui ravira les plus vieux auditeurs. Comme à l’accoutumée, il continue de nous dessiner cette carte postale de l’Islande à travers une musique qui résonne et s’inspire profondément de son héritage culturel – une exploration de l’émotion brute du rock et de la beauté écrasante de la nature, une expédition à travers les falaises déchiquetées battues par le vent et les plaines désertes, jonchées de poussière noire : La Sainte Souffrance et la solitude. « Hin Helga Kvöl » est le cri primitif de ce paysage.

À cet amalgame de grandeur et de viscéralité, le quatuor ajoute tout son savoir-faire, sa capacité à fusionner les genres pour créer quelque chose d’inédit et de personnel. Notamment grâce à la présence de nombreux invités qui viennent apporter leurs touches et tempérer ou enrichir le son (la contrebasse de Borgar Magnason sur « Freygátan », le saxophone de Jens Hanson et les voix féminines envoûtantes d’Erna Hrönn Ólafsdóttir sur « Vor ás »). Du black metal de « Hin Helga Kvöl » en passant par le rock entraînant de « Blakkrakki », de ce passage hommage à SLAYER qui fait irruption au milieu du morceau-titre jusqu’au lent et morne « Kuml », il y a tout un monde et pourtant cela reste profondément cohérent. Cela ressemble moins au scrap-booking qu’était, selon moi, « Endless Twilight of Codependent Love » (2020).

SÓLSTAFIR a toujours été un groupe à part, un groupe qui n’a jamais respecté les règles, il offre ici une pléthore de tempêtes intérieures aux gammes de styles éclectiques tout en conservant son essence pure. L’orchestration caractéristique des riffs, le ton minimaliste et le rythme inné des Islandais équilibrent une production luxuriante. Le groupe devient plus concis, se tord et se contorsionne avec brio, nous tisse sa solitude à travers la voix d’Aðalbjörn Tryggvason, sa vitalité torturée et son sérieux dramatique, ses démons intimes. « Hin helga Kvöl » est la guerre sainte à laquelle nous sommes tous confrontés en nous-mêmes…

Ce nouvel album est donc une oeuvre relativement ambitieuse, agile et gracieuse puisqu’elle semble dépasser les frontières du rock plutôt « grand public » vers lequel le groupe s’était tourné pour aller sur des territoires certes déjà explorés mais comme re-découvert… Et les ombres du fusain illustrent parfaitement ces ravins, ce substrat, ces variations et ces altitudes à couper le souffle auxquels les titres nous soumettent.

Ce voyage solitaire, presque missionnaire, du groupe témoigne de son engagement indéfectible envers l’exploration musicale et l’émotion non-filtrée. On a l’impression qu’ils ne font que re-commencer, avec un zèle régénéré. Ainsi, la souffrance n’a jamais été aussi éclairante, et je crois qu’on a tous besoin d’un peu de « Hin Helga Kvöl » dans nos vies.

Catégories : Chroniques