Contrarié par « Geometria » puis par « Naïv », je m’étais réconcilié avec THY CATAFALQUE et son « Vadak » paru en 2021. Avide de l’artiste Tamás Kátai et de ses créations, j’en attends toujours beaucoup ce qui amène parfois la déception parfois l’épiphanie, mais toujours la curiosité et l’intérêt. Au fur et à mesure de ses sorties, l’humble génie impressionne de par son éclectisme, ses concepts et son approche avant-gardiste… Il a depuis un certain temps maintenant abandonné toute idée de « tradition », n’hésitant pas/plus à entremêler à son univers métallique les éléments d’une vaste gamme stylistique à priori sans rapport afin de construire sa vision : du jazz à la pop en passant par le folk, etc. Après l’exotique et sauvage « Vadak », THY CATAFALQUE revient donc avec « Alföld », un autre volume de son catalogue déjà riche en histoires.
Lorsque que ce nouvel opus a été annoncé, il a été décrit par Kátai comme « l’album de métal extrême le plus simple et le plus classique que le projet ait jamais enregistré ». Il exprime les caractéristiques familières qui sont uniques à THY CATAFALQUE ( les mélodies distinctives, le son de la guitare, la multiplicité des voix, etc. ) et pourtant il reste surprenant à bien des égards. Selon moi et contrairement à ce qu’on pourrait croire à première vue, il ne s’inscrit pas en rupture avec « Vadak » mais bien dans sa droite lignée. Je pense aussi qu’il ne faut pas minimiser l’impact des premiers live du groupe, nous offrant un THY CATAFALQUE plus brut et débridé.
Ici, Kátai continue donc de supprimer le superflu, de supprimer des éléments plutôt que d’en ajouter, tout en conservant un style immédiatement reconnaissable et quelques touches de ses récentes expérimentations. Dans cet état esprit de purification, de retour brutal, de puissant regain d’énergie, le maître à penser va ainsi utiliser beaucoup plus de voix gutturales ( notamment celle de Lambert Lédeczy d’AHRIMAN ) et durcir son propos à grands renforts de riffs frontaux, très black, voire très death finalement.
Et le ton est donné dès « A Csend Hegyei » puis va se propager tout le long de « Alföld ». Mais dans cette bourrasque rageuse à l’âpreté retrouvée, le bougre nous offre toujours de fabuleux et (d)étonnants passages qui font de sa musique quelque chose d’extra-ordinaire. La fin heavy-épico-folk de « A Földdel Egyenlő », les flûtes, claviers et violons de « Folyondar », le synthé très Elfman de « Szíriusz », sans oublier le long et protéiforme éponyme, aussi bestial qu’envoûtant, avec sa guitare classique, ses cuivres, ses percu’ funky, et la voix folk de l’habituelle Martina Veronika qui nous démontre que l’onirisme « kátaien » n’est jamais bien loin en nous attirant dans ses boucles mélodiques que l’on ne (re)connait que trop bien.
Intentionnellement ou non, « Alföld » poursuit et reflète donc la quête de liberation sauvage de son créateur entamée avec « Vadak ». Il est à ce titre certainement l’album le plus court, le plus concis et le plus intense du projet à ce jour, sorte de concrétion magmatique d’idées sombres, comète ardente à la trajectoire saccadée et à la destinée obscure qui vient écraser nos attentes de sa pesanteur extrême… et ça marche !