Sylak Open Air 2022, les meilleurs moments du festival !
Après deux ans d’arrêt à cause de la crise sanitaire, le SYLAK est revenu pour s’offrir un nouveau sold-out bien mérité. Une programmation impeccable, une organisation au top, et un public toujours aussi fervent, empli d’un esprit de fête et convivialité. Le Sylak Open Air fait partie de nos festivals préférés, par sa jauge à taille humaine, sa programmation hétéroclite et inter-générationnelle.
Avec 28 groupes à l’affiche, du vétéran à la plus jeune des formations, le public venu en nombre avait de quoi se régaler. Depuis 2018, le festival accueille 10 000 spectateurs, et améliore sa fréquentation cette année. La canicule aura pendant 3 jours mis à rude épreuve la résistance des festivaliers, des équipes techniques, les 280 bénévoles et les groupes venus s’en donner à coeur joie durant cette bulle estivale dédiée à la musique extrême.
JEUDI 5 août
Nous arrivons sur la fin de DEAD KIWIS qui entame la célèbre soirée mousse du jeudi soir. On cherche encore l’ombre, et les tireuses à bière coulent à flot quand les dernières notes de leur set résonnent. DEAD KIWIS fait partie des petites perles cachées de l’underground lyonnais que le SYLAK a coeur a à soutenir ; nulle doute que ces grands fans de THE DILLINGER ESCAPE PLAN reviendront par chez vous, essayez de ne pas les manquer.
Après la décharge d’énergie métallique de DEAD KIWIS, ULTRA MOULE est venu nous inviter à bouger notre boule.
https://www.youtube.com/watch?v=LqQxzNy6yPA
La température monte sur la scène, sous les pis géants qui déchargent la mousse à flot, la fête éclate véritablement, car les trois allumées de ULTRA MOULE ont décidé de mettre de l’ambiance. Et c’est réussi, elle donne une furieuse envie de danser et de se déhancher sur leurs tubes acidulés.
ULTRA MOULE, c’est d’abord un violon et un violoncelle électrique, une boîte à rythme, et surtout des textes provocants, féministes, criés et rappés, et revendicatifs. Le public du SYLAK semble tout d’abord un peu perdu face à la triade lyonnaise, essayant de décrypter son sens de l’humour bien particulier. Puis leur punk sans chien mais à chattes (c’est elles qui le disent !), faisant penser méchamment à un gangsta rap prend, et les terres gourdanaises commencent à trembler sous les pas de danses frénétiques. Le public suit leur séance de yoga tantrique et finit par rigoler devant ce mélange atypique entre Philippe Katerine,Die Antwoord et Sexy Sushi.
SUBLIME CADAVERIC DECOMPOSITION, le projet death/grind old school mené par l’indéboulonnable Seb, reste un étendard dans le milieu en terme d’intégrité. Leur « RAPING ANGELS IN HELL » sorti en 2017 renouait enfin avec le gore des débuts qui avaient marqué ceux de la génération BONES BRIGADE. Le gimmick de SCD est ancien et ancré dans une certaine tradition old school sanguinolente. Les gros mi-tempo écrasant et les variations de rythmes sont l’essence de ce genre- et séduisent le public fan de metal extrême venu ce soir. Seb dégurgite plus vite ses borborygmes qu’un stakhanoviste condamné au goulag et la nostalgie nous étreint en repensant à cette scène pleine de poésie, auquel SCD nous a fait songer : PUNGENT STENCH et MACABRE en tête.
BORN FROM PAIN finit la soirée en apothéose. Plus de vingt ans que ces Néerlandais, originaire de Herleen, parcourent le monde avec le Hardcore tenance et plein de fougue. Ils furent à leur début un des premiers du genre à s’exporter à l’international. Ils avaient joué lors de la 1ère édition du SYLAK, et sont fiers de le rappeler à tous ce soir. Malgré les cheveux devenus blancs, et les bedaines, l’énergie est entière, le plaisir de partager un son gras et groovy pour faire mosher les masses reste intacte.
SAMEDI 6 août
BENIGHTED se devait de réveiller les festivaliers assommés par la canicule. Autre défi qu’il devait relever : le départ récent de son guitariste Fabien « Fack » Desgardins, soit jouer des compositions écrites pour deux guitares avec une seule. Heureusement pour ce gros nom de la scène française du grindcore, le pilier du groupe Manu (Emmanuel Dalle), compositeur principal, tient la barre – et fait sonner comme jamais les titres phares du groupe : « Cum With Disgust », ou encore « Experience Your Flesh ». Défendant leur excellent dernier album ‘Obscene Repressed’, leur brutal death mâtiné de hardcore déclenche le point de départ d’une course effrénée dans le pit de 40 minutes. Le groupe n’oublie pas de rendre hommage au regretté Trevor Scott Strnad de THE BLACK DALHIA MURDER, disparu il y a 4 mois. Le dernier morceau sera sans surprise comme l’annonce le sympathique Julien Truchan leur emblématique « Let the blood spill between my broken teeth ». Si tout ce qui doit venir jouer cet après-midi est du même tonneau, la journée risque d’être un long moment de jouissance musicale et de souffrance pour les pieds.
Difficile de ne pas comparer NERVOSA et CRYPTA, les deux groupes nés de la scission du premier. DIVA SATANICA arrive sur scène dans un short noir saillant en entamant un jeu de scène assez reptilien et heavy metal. Il faut dire que le groupe thrash/death mené par la brésilienne Prika Amaral ressemble à une bande de mercenaires de luxe, rassemblé à la va-vite pour défendre le bastion que la fondatrice du groupe avait bâti aux côtés de sa désormais némésis Fernanda ‘Fefe » Lira, leader de CRYPTA. Le full metal girlband semble « nerveux« au début du set : Mia Wallace très concentrée sur le son de sa basse, de même que la nouvelle batteuse argentine Nanu Villalba se démenant derrière ses fûts. Sans être exceptionnel, le concert du groupe montre la volonté de ces filles d’affronter toutes les difficultés d’un groupe redémarrant de zéro.
On aurait aimé que des bouchons d’oreilles soient encore disponibles à l’entrée du festival quand résonne la basse de notre bien aimé idole ABBATH avec son « The Ultimate Motörhead tribute », BOMBERS. Se lançant dans des petits déhanchés de crabe dont il a le secret, Abbath jouit d’un talent certain d’imitation de Mr Kilmister. L’hommage est parfait, avec son comportement de jeune hooligan à la basse, et poussant le mimétisme jusqu’à afficher la même bedaine que son idole, Mr. Abbath tient sa baraque et offre du rock’n’roll arrosé au Jack Daniels.
« I don’t share your greed, the only card I need is the Ace of Spades »
Les pionniers du grindcore de NAPALM DEATH débarquent en plein soleil, et les anglais ne se laissent pas démonter par la sueur qui coule en permanence sur nos tempes. Ils se sont même adaptés avec des chemises à fleur très colorées pour le bassiste et le guitariste. Barney est en joie et nous rappelle les fondamentaux de l’engagement politique de NAPALM DEATH – présentant ainsi les titres écrits comme des brûlots prêt à jeter à la face de l’establishment et à chaque politicien moralisateur. On a retenu « Contagion » du dernier né “Throes of Joy in the Jaws of Defeatism”, « Continuing War On Stupidity« , et les classiques ‘Scum‘, « Suffer the Children« . Tous les titres seront joués dans une joie communicative – qui sera partagée par le public. Nous avons appris avec une profonde tristesse que le lendemain le bassite Shane Embury perdait sa mère, et nous présentons nos condoléances à sa famille.
A 20H50 alors que le soleil se couche doucement et que les ombre s’allongent, apparait les très attendus JINJER ou plutôt le Tatiana Shmayluk show, tant la présence de la chanteuse efface celles des musiciens. Immanquablement tous les regards sont portés sur elle, et son charisme, sa beauté et sa technique vocale subjuguent une partie de l’assistance. Au milieu du concert, Tatiana n’oubliera pas de rappeler qu’un des moyens de soutenir leur partie d’origine, l’Ukraine, est d’acheter leur merchandising. Le public est plus calme pour écouter des titres proposant un djent hardcore très technique pour lequel le guitariste et le bassite semblent très concentrés et (trop) appliqués et finalement peu présents. Tatiana, elle, ne déçoit pas, et égale à elle-même, aussi à l’aise que dans son salon, elle prend le temps même de s’asseoir pour nous bercer d’un « Pisces » réussi.
L’enchaînement de titres de CARCASS sur 1 heure va dépasser le pouvoir de résistance de nombre de nuques d’headbanger. Passant en revue tous les titres phares de ses 4 premiers albums, les Britanniques ne desserreront que peu la mâchoîre, mais balanceront une floppée de tubes metal aiguisés comme les scalpels illustrant le backdrop, extrait de leur album « Surgical Steel« . On reste un peu sur notre faim, uniquement parce que Jeff Walker nous prive de son humour grinçant – mais dans tous les cas, exsangue pour la soirée.
DIMANCHE 7 août
HANGMAN’S CHAIR entame son set dans une fournaise qui nous donnerait envie de se coller des bâtonnets glacés tout le long de l’épine dorsale. Fort d’un album « Loner » nettement plus cold, il rassemble les fidèles du heavy doom devant la scène. La chemise boutonnée jusqu’en haut du guitariste Julien Chanut nous impressionne, autant que sa magnifique Telecaster en verre transparent. Lourde mais aussi aérienne, la musique d’HANGMAN’S CHAIR s’apprécie plus facilement dans les caveaux obscures ou seul avec son casque. Même s’il n’est pas évident d’ambiancer à 15h une scène de festival, le groupe s’y attèle avec conviction. Ils n’ont plus vingt ans, mais possèdent toujours cette même rage hardcore des débuts lorsqu’ils jouent des titres comme « Naive » à la mélodie si diaphane. Reste que la voix de Cédric Toufouti se pare désormais de trop d’effets, perdant un peu de son impact naturel.
MISERY INDEX, en deux décennies d’existence, a réalisé 6 albums studios et un album live, a joué dans plus de 44 pays et continue toujours à repousser les standards de son death metal virulent en y intégrant comme sur le dernier opus « Complete Control », une touche heavy. Les ‘Ricains du Maryland aiment nous emmener dans leur ambiance de crypte chargée de blast beats et de breaks syncopés avec un son propre de bout en bout, tout en veillant à être headbangable sur chaque morceau grâce à une grosse louche de touch guy hardcore.
Le groupe qui va galvaniser les foules en matière d’extrémité en ce jour est bien évidemment SUFFOCATION. Rebâti une nouvelle fois autour du vétéran et fondateur, Terrance Hobbs, qui a crée cette légende new-yorkaise du brutal death metal il y a 30 ans, le groupe s’est renouvelé avec un sacré équipage. Avec des musiciens de hautes volées : Ricky Myers (chant, et aussi batteur de DISGORGE), Charlie Errigo (Pyrexia), Derek Boyer (bassiste ex.Dying Fetus) et Eric Morotti (batterie), le groupe est loin d’être une gloire du passé, mais bien un vindicatif combattant de la cause metal extrême. Les velléités d’évolution musicale n’ont jamais été le fort de SUFFOCATION, qui joue une musique ultra lourde, acérée, et finalement en un mot : suffocante. Derek a sans doute le son de basse le plus cinglant et métallique qui soit, Myers est un géant que l’on n’aimerait pas rencontrer ivre dans un pit, et Terrance reste aussi affuté qu’il y a 3 décennies.
EXODUS ne joue pas non plus la carte de la nostalgie, quoique si, un peu soyons honnêtes. Lee Altus, ayant dû rentrer aux Etats-Unis à cause de problèmes familiaux, il est remplacé par le jeune guitariste de BLACK DALHIA MURDER –Brandon Ellis, ce qui nous rappelle l’hommage d’hier par BENIGHTED à ce héros de la scène metal Trevor Scott Strnad. La présence de Gary Holt est saluée par le chanteur pour son retour après son expérience chez SLAYER, et celui-ci nous jouera de manière provocante quelques notes des dieux du thrash. Ambiance Bay Area thrash metal pour ces pionniers incarnant cet esprit du metal sorti des années 80, avec un Steve Souza, chanteur moins intense que Rob Dukes pour certains, mais qui tient la barre et mène la danse en faisant des allers-retours d’un bout à l’autre de la scène. Gary Holt -auréolé de toute sa gloire- assure le show.
Aux alentours de minuit, TESTAMENT aligne ce soir son line-up de rêve, Dave Lombardo (ex. SLAYER) à la batterie et Di Giorgo (ex.DEATH) à la basse. Les Californiens sont évidemment ultra attendus. Sous les étoiles, et en un déluge de décibels, les patrons et « papa » du thrash metal balancent des titres comme « Over the Wall», le premier titre de leur premier album « The LEGACY » sorti en 1987, de même que « Alone in the Dark », extrait du même opus. CHUCK BILLY, bien que statique, ne laisse pas beaucoup de répit au public. Puis ils enchaînent l’hommage à leur album fétiche sorti il y a 33 ans, « Practice what you preach » nous ramenant à l’époque du thrash triomphant avant qu’il soit vaincu début 90 par le groove metal et le méchant death metal.
Il nous aura fallu patienter deux longues années pour revivre de telles émotions sous le ciel gourdanais. Un laps de temps qui aura permis à l’équipe de Sylak de reprendre des forces, puisque dès le traditionnel discours de fin de festival ses organisateurs annonçaient qu’il y aurait bien une 11ème édition !
Tous nos remerciements à l’équipe du Sylak Open Air –