Interview de l’artiste britannique A.A. WILLIAMS – Si « Forever Blue » était le point de départ d’un voyage, mon nouvel album en serait la suite logique.

image article Interview de l'artiste britannique A.A. WILLIAMS - Si « Forever Blue » était le point de départ d’un voyage, mon nouvel album en serait la suite logique.

On devait la rencontrer au Hellfest, on n’a pas pu pour diverses raisons logistiques mais on s’est vite rattrapé. L’artiste britannique, multi-instrumentiste, A.A. WILLIAMS nous parle donc de ses expériences, du live, de son nouvel album, du passé, du présent, du futur. Bref, un entretien complet et passionnant pour une artiste qui l’est tout autant.

Tu as joué deux fois au Hellfest cette année, une première fois avec MONO et JO QUAIL ( A.A. WILLIAMS y a joué des cordes, du piano et y a chanté également ), la deuxième fois toute seule. Comment étaient ces shows ? Comment as-tu vécu cette expérience ?

C’était super, c’était vraiment génial. Le premier show ( celui avec MONO ) était un peu secret. On a gardé le silence, on a préféré ne rien dire à personne jusqu’au dernier moment parce qu’on trouvait ça marrant et sympa de créer la surprise, que le public ne me voit que lorsque j’arrive pour chanter « Exit In Darkness ». Bon, il faut aussi dire que j’avais perdu ma voix la semaine précédente, et je n’étais vraiment pas sûre de pouvoir le faire. Ça a été compliqué, j’ai passé deux bonnes semaines sans pouvoir parler ou chanter, ou quoi que ce soit d’autre. Ça a pris du temps, je ne me suis décidée réellement que la veille du show. J’étais donc très nerveuse lors du show, j’avais peur que ça recommence parce que tu as beau tester chez toi, les conditions live ne sont pas les mêmes du tout. Mais ça l’a fait et j’étais beaucoup plus détendue après, pour le deuxième show, et c’était génial. J’étais étonné de voir autant de monde sous la tente. C’était merveilleux et j’ai vraiment passé un bon moment, vraiment cool.

Ce n’est pas bizarre pour toi de jouer dans un festival comme le Hellfest, parce que ta musique n’est pas vraiment identifiée metal ?

Non, je ne pense pas. Je pense qu’il y a beaucoup de parties dans ma musique que les gens, que le public metal peut aimer. Tu sais, les gens qui aiment la musique « heavy », je pense qu’il y a beaucoup de parties dans ma musique qu’ils apprécient pour diverses raisons, il y a beaucoup de sections « heavy » et je traite aussi des sujets assez sombres. Je pense qu’il y a beaucoup de parallèles entre ma musique et le metal « traditionnel ». En plus, sur un festival aussi gros que le Hellfest, il y en a un peu pour tout le monde et au bout de deux semaines de gros metal, les gens ont envie d’un peu de changement, de variété. C’est juste plus agréable pour le public. C’est un peu comme avec MONO, si tu vas les voir en tant que metalleux de base, tu peux être surpris car il y a beaucoup de choses dans leur musique que tu pourrais apprécier, sans même t’en douter. 

image article Interview de l'artiste britannique A.A. WILLIAMS - Si « Forever Blue » était le point de départ d’un voyage, mon nouvel album en serait la suite logique.

Ton premier album « Forever Blue » est sorti il y a deux ans, quel regard portes-tu sur lui aujourd’hui ?

Je suis très heureuse qu’il soit sorti à ce moment là. Je veux dire qu’il ait été fait avant le confinement, il est sorti juste au début du confinement ( en Angleterre ). Du coup, c’est devenu un peu un disque « à écouter » en confinement mais ce n’était évidemment pas du tout prévu pour être ça. Maintenant et pour cette raison, je pense que pas mal de gens y sont assez attachés, parce que au cours des premiers mois de la pandémie, tout était un peu incertain et les gens s’accrochaient aux choses desquelles ils se sentaient proches, familiers. J’ai beaucoup de gens qui viennent me voir et me disent : « Oh, ouais ! C’était mon album de confinement. Je l’ai écouté genre tout le temps ». Je suis vraiment reconnaissante de ça. Je suis vraiment contente que cela soit devenu quelque chose de bien, de positif pour les gens durant une période qui ne l’était vraiment pas. Maintenant, je peux enfin interpréter correctement ces titres, en live et je peux enfin interagir avec toutes ces personnes. C’est enfin dans « la vraie vie » ! Ce n’est plus seulement derrière un écran. Il y a plein de gens qui ne m’ont jamais vu en concert auparavant, mais ils ont entendu ces titres, et pouvoir avoir enfin cette connexion avec eux c’est vraiment génial. Je suis donc très reconnaissante de faire tous ces festivals, et de pouvoir rencontrer tous ces gens.

image article Interview de l'artiste britannique A.A. WILLIAMS - Si « Forever Blue » était le point de départ d’un voyage, mon nouvel album en serait la suite logique.

Je sais qu’il y a un nouvel album qui arrive cette année, à quoi faut-il s’attendre ?

Eh bien, déjà j’ai pu passer plus de temps à créer cette fois-ci. Je pense que, d’un point de vue de la production, c’est un pas en avant par rapport à « Forever Blue » en termes de tonalités, et aussi d’arrangements. Tout est mieux en fait ! J’y ai passé plus de temps donc il est plus détaillé, plus fouillé, il y a plus d’expérimentation aussi. Je pense que mes textes sont plus variés également. Ce n’est pas complètement une sorte de super insula comme le premier album était, je pense qu’il y a un peu plus de variété.

Je crois que c’est « Forever Blue » mais en plus. Tu vois ce que je veux dire ? C’est un peu comme si « Forever Blue » était le point de départ d’un voyage, ce nouvel album en serait la suite logique. Je pense que les gens oublient parfois que lorsqu’on commence à écrire de la musique, on n’est jamais un artiste « entier », complet. On commence par un EP puis on fait un pas vers un premier album et ainsi de suite, c’est une sorte de voyage continu. On évolue. Ce n’est pas comme si tous les albums allaient être pareils, il y a des tas de directions qu’on peut prendre mais il y aussi des similitudes. Les textures et le genre de choses que j’aime faire avec les cordes seront toujours là parce que c’est ce qui me définit. Je me sens également plus confiante maintenant que lorsque j’ai fait « Forever Blue ». Je suis plus sûre de moi, de la manière dont j’écris, de la manière dont j’arrange mes morceaux pour qu’ils prennent encore plus d’ampleur, de la manière dont je chante aussi. Je suis plus confiante que je ne l’étais à mes débuts. 

Tu penses être une meilleure chanteuse maintenant ? 

Meilleure, je ne sais pas mais je me sens plus à l’aise. Quand j’ai fait mon premier Ep, je n’avais jamais vraiment fait grand chose, encore moins montrer aux gens à quoi ressemble ma voix. Quand je le réécoute, j’ai l’impression que ça sonne très timide, et je me sens très nerveuse. Sur « Forever Blue », c’est autre chose encore, c’est un pas en avant. Je me sens plus à l’aise de manière générale avec ma voix, je me sens plus à l’aise à chanter en live maintenant qu’avant. Comme je l’ai déjà dit, ce n’est qu’un voyage, je suppose.

Ton nouvel album s’appelle « As The Moon Rests », qu’est-ce que cela signifie ?

Ce titre est le titre de la dernière chanson de l’album, qui est pour moi particulière. C’est une chanson d’amour, il s’agit d’une sorte de lien inconditionnel entre deux personnes ou deux moitiés, pas nécessairement de manière romantique, cela peut aussi bien être un parent et un enfant, un couple, un frère ou ce que vous voulez. Il est comme un lien fondamental qu’on ne peut rompre. C’est un truc fort, ce genre d’engagement inconditionnel, inébranlable envers quelqu’un, exactement comme la lune qui est là toutes les nuits. Elle est toujours là, constante. Tu vois ce que je veux dire ? Et j’adore ce titre ! Quand on a composé la liste des morceaux, l’ordre sur l’album, il n’y avait pas de meilleur endroit pour lui que la fin. Et ça m’a immédiatement sauté au visage comme titre pour le disque, en partie parce que cet arc de sentiment est au-dessus de tout du point de vue du texte, mais aussi parce que, pour être honnête, je trouve que ça sonne bien.

Y aura-t-il des invités sur l’album ?

Non, j’ai bien peur qu’il n’y ait pas d’invités sur celui-ci. Seulement moi.

Comme j’ai pu le voir, tu as une formation classique, tu joues beaucoup d’instruments, est-ce que ça change ta façon de composer et d’envisager ta musique ?

Je pense que oui. mais j’ai appris dès mon plus jeune âge, donc c’est presque quelque chose d’inné pour moi, c’est naturel Tu sais, jouer de tous ces instruments, je l’ai appris très jeune, je n’ai donc jamais essayé de composer sans ces connaissances. C’est un peu comme être élevé en étant capable de parler une deuxième langue, tu ne sais pas ce que c’est de ne pas être capable de parler ces deux langues… Je pense donc que cela change définitivement ta façon de faire, intrinsèquement. Ensuite, il y a le côté purement pratique. Je peux tout enregistrer moi-même, les guitares, le piano etc. Pour tous les instruments à corde par exemple, je peux les jouer moi-même, en faire la démonstration à ceux qui vont jouer ces parties également, et donc exprimer et expérimenter directement plutôt que de le faire à travers quelqu’un d’autre. C’est juste plus facile de le faire soi-même, et donc à partir de ce moment-là, je pense que c’est vraiment très, très utile.

Tu as sorti un album de reprise enregistré pendant le confinement ( « Songs From Isolation » ). D’où est venue l’idée de faire ces titres là ? Comment ça s’est passé ?

Comme ça en fait ! J’étais chez moi avec mon piano, quelques micros, et une de ces guitares ici ( elle me montre ces guitares derrière elle ), et c’est à peu près tout… Ce n’était clairement pas une configuration d’enregistrement professionnel ! Puis j’ai commencé à les poster sur mes réseaux sociaux. Je voulais juste avoir un petit projet, pour passer le temps. Alors, les gens ont commencé à me suggérer des idées comme RADIOHEAD ou NINE INCH NAILS ou DEFTONES. Et je me suis dit : « Oh, ok, vous voulez que je les reprenne, c’est cool, je vais essayer ». À ce moment là je me suis dit que les reprises étaient vraiment cool et j’ai eu envie de continuer à garder cette interaction avec les gens, ce dialogue dont on a parlé tout à l’heure. C’est devenu un projet vraiment agréable de passer du temps à travailler sur les arrangement, les tourner et essayer de monter les vidéos et tout. C’était bien d’avoir quelque chose sur quoi se concentrer. C’était bien d’avoir un exutoire créatif vraiment agréable, de bosser pour et avec les fans aussi. Les gens qui écoutent ma musique, on en parlait tout à l’heure sont très éclectiques, on m’a autant suggéré GLEN CAMPBELL ( chanteur de country américain ) que CULT OF LUNA… J’ai en plus eu une plus large couverture grâce aux réseaux sociaux et à ces chansons mais je n’avais jamais prévu que ce soit un album complet et qu’il sorte. Et si j’ai pu d’une manière ou d’une autre amener certains auditeurs à écouter tel ou tel artiste à travers ma ré-interprétation acoustique c’est super cool ! Je suis donc très satisfaite de la façon dont il est sorti, et de la manière dont les gens l’ont accueilli.

En plus, c’était une période bizarre pour tout le monde, pour les artistes aussi. Beaucoup se sont sentis pressés d’être productifs, parce qu’on ne pouvais pas tourner, alors il fallait faire des albums, des trucs etc… Moi, je suis quelqu’un qui doit être occupée, je suis comme ça de toute façon, j’aime être occupé, j’aime être productive. Il y a beaucoup de gens qui se sentent vite sous pression et je pense que pendant le confinement, il y a des artistes qui ont essayé de forcer la créativité, alors que ce n’est jamais très bon, parce que certaines maisons de disques voulaient continuer de sortir des disques etc… Il aurait mieux fallu laisser les gens gérer leur situation, à leur façon. Pour moi c’est super parce que je suis un bourreau de travail, et c’est comme ça que je fais les choses, mais je pense que beaucoup d’artistes ont sorti des choses peut-être parce que quelqu’un d’autre le voulait et non pas parce qu’ils le voulaient… Je suis reconnaissante que personne ne m’ait jamais mis la pression. Moi, je voulais juste créer quelque chose, et en être satisfaite. C’était tellement cool et simple que les gens me demandent encore lors de concerts : « Oh, tu peux jouer celle-ci ou celle-là ? » Et moi, je suis comme genre : « Non, je suis désolée ». Mais c’est vraiment cool que les gens demandent encore à ce sujet, et qu’ils continuent à acheter l’album. C’est fou.

Donc tu n’as pas l’intention de jouer ces chansons en live ?

Je l’ai fait une fois à Londres il y a environ un mois. Juste pour essayer. Mais mon Dieu, c’était beaucoup trop de travail de se souvenir de tous les arrangements et de toutes les paroles aussi, parce que quand j’ai fait les vidéos, j’ai tout fait en direct. Donc je ne me souviens pas vraiment des parties de piano. J’ai donc dû réécouter et retravailler. J’ai dû écrire les parties et réessayer. Au final c’était un moment délicat un peu comme l’album l’est. Après envisager de le refaire ? Pour le moment, non. Peut-être plus tard mais avec un groupe au complet parce que je ne me vois pas virer tout le monde de scène, m’installer à mon piano et assommer le public pendant dix minutes. Je n’ai pas envie de faire un passage rapide avec ces titres au milieu d’un show, cela me paraît bizarre et déplacé. Alors peut-être un jour mais pas maintenant…

Maintenant c’est quoi la suite pour A. A. WILLIAMS ? Tu as des festivals cet été ?

Ouais, absolument. Encore quelques festivals à faire cet été. Il y a le Radar Festival et l’ArcTanGent Fest, puis tout de suite après je serais avec MONO en tournée dans toute l’Europe. C’est très excitant ! On part vers la fin août et je crois qu’on a 4 ou 5 dates françaises. Je sais qu’il y a Paris et Lyon. Ensuite, j’ai un concert à Londres où je vais jouer tout le nouvel album en entier avant qu’il ne sorte. Au lieu d’avoir une soirée d’écoute ou de sortie de l’album, j’ai choisi de faire ça. Un truc spécial qui va permettre aux gens d’entendre l’album en live avant tout le monde, avec un groupe au complet, des cordes etc…

Et après en novembre, je ferais une tournée en tête d’affiche dans toute l’Europe, il y aura genre sept concerts français sur cette tournée…

Merci beaucoup, un dernier mot ?

Merci pour le soutien, c’est très agréable de voir autant de médias français s’impliquer, surtout après le Hellfest. C’est incroyable de voir autant de gens me contacter. Je suis très reconnaissante de tout cela, et très impatiente de revenir jouer en France. Il faut absolument que j’apprenne quelques mots de français d’ailleurs…

C’est noté ! Encore merci et à bientôt.

Partager