[ Chronique ] HEILUNG – Drif ( Season Of Mist )

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Depuis sa création, l’énigmatique collectif HEILUNG ouvre de nouvelles perspectives au style néo-folk. Avec un regard singulier vers le passé tout en ne délaissant jamais le présent, le trio s’est inventé sa propre étiquette avec le terme : Histoire amplifiée. Un terme qui définit son art et qui souligne cette capacité à vouloir (re)connecter la société moderne aux débuts de l’humanité à travers ses sons et ses textes. Fort des ses précédentes oeuvres, le groupe a durant la pandémie pu se concentrer sur la création et sur des projets « annexes » comme la participation à des séries tv, des films ou des jeux vidéos ( « Game of Thrones », « Vikings », « The Northman », « Conqueror’s Blade VII : « Wolves of Ragnarök », etc. ) faisant définitivement sortir son art de l’anonymat et de l’underground… 

Aujourd’hui, les Danois reviennent avec leur troisième album, un nouveau voyage dans le temps ( mais aussi dans l’espace ) baptisé « Drif ». A contrario de groupes comme WARDRUNA qui restent très ancrés dans le giron d’une culture, d’une histoire et d’une aire géographique bien précise, le travail de HEILUNG vient dépasser les frontières de l’Europe du Nord pour essayer de trouver des connexions à travers l’Humanité entière.

Musicalement, « Drif » reste sur les bases des précédents efforts du groupe c’est à dire une instrumentation simple, minimaliste, presque archaïque qui met en avant les rythmes ( cloches, percussions, os ) et les voix, mais également quelques nappes électroniques subtiles qui viennent renforcer les atmosphères déjà captivantes.

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Ainsi, tous les titres de « Drif » semblent indépendants et pourtant connectés. Outre les rituels et classiques « Asja » et « Anoana », il y a « Keltentrauer » en langue germanique qui nous conte une histoire dans un style très théâtral, très cinématographique, avec seulement quelques sons qui viennent enrichir une voix prenante. Plus loin, les mélodies de « Nesso » ou de « Marduk » transportent le rite en Mésopotamie ou en Orient grâce à ses mélodies mystérieuses et chaloupées. Mais selon moi, la pièce-maîtresse, la vraie bonne surprise est « Tenet ».

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Le titre est une expérience qui tire son essence d’un palindrome : tous les éléments peuvent se lire, se jouer voire même s’écouter dans plusieurs sens. Il est basé sur le carré de Sator, une ancienne inscription palindromique découverte à Herculanum en Italie, une ville ensevelie lors de l’éruption du Vésuve en 79 après JC. Si l’interprétation de cette inscription fait débat, il se dégage néanmoins du texte quelque chose de magique et d’hypnotisant. Ainsi, chanté ou déclamé, il sert de base et vient nous envelopper jusqu’à nous pénétrer, nous plonger plus avant dans le rituel et l’introspection pour ne plus nous lâcher ( j’ai dû le chanter dans ma tête pendant au moins une semaine ). De plus, sa mélodie a également été créée grâce à un système tiré du carré afin de donner naissance au premier palindrome mélodique de HEILUNG. Étonnant.

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Au final, « Drif » ( qui signifie « rassemblement » ) semble vouloir aller plus loin que simplement créer un lien, si ténu soit-il, entre passé et présent. Il est une collection, un collage sonore et narratif qui cherche à nous (ré)unifier, à nous (re)solidariser à travers une cérémonie singulière mise en oeuvre par HEILUNG. 

Comme à son habitude, le groupe y expose donc sa propre spiritualité, sa propre philosophie, hors des religions institutionnelles ou des idéologies politiques, il part en quête d’harmonie et de connexions inter-civilisationnelles. Il rend ainsi hommage à toutes les cultures, celles d’Orient et d’Occident, celles du passé et du présent, les liant les unes aux autres, leur insufflant un sentiment d’ouverture permettant d’éviter l’insularisme, une oeuvre comme une manière de guérir et bercer d’espoir notre monde ( qui semble en avoir de plus en plus besoin ).

 

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