[ Chronique ] DEVIL MASTER – Ecstasies Of Never Ending Night ( Relapse Records )

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Ma première incursion dans la musique DEVIL MASTER s’est faite par l’entremise de leur vidéo pour le titre « Acid Black Mass » et on peut dire que j’en suis ressorti interloqué : qui sont ces mecs qui semblent tout droit sortis d’une parodie des 80/90’s avec leur style gothique proto-black, leurs surnoms à rallonge et leurs effets VHS ? Et en même temps, j’ai senti un souffle assez puissant de nostalgie, un grain que j’ai reconnu tout de suite et qui m’a immédiatement fait revivre cet âge d’or du metal ( aujourd’hui fantasmé ) où tout était encore à faire, où l’on vivait le metal à travers les compilations, les K7, les formulaires de vente par correspondance, le papier glacé de magazines désormais disparus…

À sa manière et malgré son jeune âge, DEVIL MASTER est une sorte d’hommage à tout ça, à cette période « bénie des dieux ». Formé en 2015 à Philadelphie par des Américains et des Britanniques issus de formations polystylistiques ( IRON AGE, POWER TRIP, MAMMOTH GRINDER, INTEGRITY ), le groupe sort quelques démos avant de signer chez Relapse et de balancer un séduisant premier album, « Satan Spits On Children Of Light », qui pose les bases de son style frisant le pastiche, entre black old-school, speed metal, d-beat, gothique de pacotille, très kitsch, mais musicalement insolent et audacieux. Le résultat est tellement convaincant et irrésistible, qu’on ne sait si on doit se marrer ou les prendre au sérieux… Aujourd’hui, le groupe revient avec un nouvelle formation, mais les mêmes artifices, le même maquillage grossier, les mêmes costumes factices, et un nouvel album, « Ecstasies Of Never Ending Night » avec toujours autant d’idées !

Produit par Pete DeBoer ( BLOOD INCANTATION, SPECTRAL VOICE ), ce nouvel album a été enregistré selon les règles de l’époque, c’est à dire en live et sur bande analogique, pour un rendu très organique mais chaleureux, riche et dense. Dès la première écoute, on est plongé dans des titres à forte personnalité, plus complexes et immersifs que sur leur premiers essais mais qui semblent également couler de source. Tout en calculant sa dose de stéréotypes, DEVIL MASTER semble vouloir dépasser le satanisme enfantin de ses débuts pour filer vers une spiritualité plus sombre et plus mature.

Après une courte introduction, « Enamoured In The Throes Of Death » lance avec vigueur les débats dans un style fait de mélodies imparables , de rythmes agressifs et de solos hyperboliques qui rappellent autant les plus belles heures de la NWBOHM que le punk à tendance crust ou le proto-black d’un CELTIC FROST, voire le black d’un GORGOROTH. Les influences se mêlent donc avec fluidité et folie créant un édifice solide et romantique, monstrueux mais fait de chair, de sang et de larmes. « Acid Black Mass » donne le ton avec son maelström de punk aussi furieux que noirci, écrit sous acide, qui confère une intensité et une étrangeté particulièrement passionnante à « Ecstasies… » ( ambiance chaotique mais entraînante que l’on retrouvera sur des titres comme « Funerary Pyre Of Dreams & Madness », « Shrine In Cinder » et « The Vigor Of Evil » ). Ailleurs, on se délecte de basse ronflante comme sur le death-rock spiralé de « Abyss In Vision » ou le goth’ irrésistiblement dansant d’un « Never Ending Night » qui nous offrent des couches d’atmosphère bien plus raffinée. 

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DEVIL MASTER baigne donc dans son jus, pertinent et corsé, enthousiasmant, et que l’on savoure avec délectation jusqu’à sans lécher les doigts, sans jamais sans écoeurer. Nourri au triptyque sexe, drogue et rock’n’roll, et à tout ce qui touche de près ou de loin au folklore metal, le groupe tranche avec un discours sérieux qui le rend d’autant plus ambivalent. Satanistes ludiques, jeunes inconscients ou génies de l’autodérision, mon choix n’est clairement pas fait et je reste sceptique quand j’entends leur leader, Darkest Prince ( !! ), affirmer que : « le christianisme est le véritable culte de la mort, que la vie ne devrait n’être qu’amusement, qu’au final la magie règne partout et à chaque instant, et que la musique en est la forme la plus élevée. »  C’est à prendre ou à laisser…

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