Playlist Sound Protest d’août – Promesses estivales.

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Derrière mes lunettes, les yeux fermés, je rêve de soleil, de plage, de balades pleines d’optimisme sur des grandes étendues de sable fin, chaud. Sensation douce. Grand bac se demandant quand viendra dévaster la cuiller à former les boules ; milliards de grain entassés couleur vanille, aux parfums capiteux et entremêlés, presque indistincts, de monoï, de coco et d’ylang-ylang. Réclame éculée pour savon basse qualité. J’aspire les embruns, je prends de profondes bouffées et me nourris de cet air marin érigé en culte par les respirationnistes et autres bonimenteurs. Au loin, les brisants moutonnent, l’écume blanche et salée se mélange à mes pieds. Sensation agréable.
Anémones, clowns, fine fleur du peuple astérozoastre batifolent mollement ; quelques crabes géants que l’on croise habituellement près du Kamtchatka se débattent, effrayés par de vilains exo-squelettes et autres céphalopodes à texture plastifiée. En profondeur, j’imagine ces bancs d’écailles, essaims aquatiques serpentant en sinusoïde, traçant des courbes et des droites, mus par un énigmatique désir mathématique… Beau mais mystérieux monde, abysses insondables…
Subrepticement, mon orteil est heurté par un flacon, de belle façon, bouché à la cire, et contenant un petit rouleau de papier. Encore un mythe désuet. Je m’assois sur la dune humide, au milieu des chardons. Pantalon mouillé. Quelques bouts de cire en bouche, goût iodé, je lis avec avidité ces mots doux et positifs, voeux pieux et auto-formulés d’un été rêvé. Sensation désagréable.
Quelque chose cloche. Derrière cette auguste trouvaille semble se dessiner un délire pronoïaque, un déni de réalité. Tout n’est que fiction, « simulacres et simulation », comme l’a en son temps écrit Baudrillard. Les yeux bien ouverts, les lunettes relevées, les augures galets me paraissent tout à coup glissants et vermoulus, mes mollets empêtrés dans un vaseux smoothie goût algues vertes – eau kaki et autour de moi coule le sang gris de l’aménagement côtier.
J’admire alors un navrant spectacle couleur ciment : « rivage-béton-plat » souillé. Dans mes mains, nul flacon magistral à la De Vigny, juste une misérable bouteille plastique à l’effigie d’une marque de soda depuis longtemps oubliée. Je me suis fait piéger par mes désirs, par mes souhaits, attraper comme un rêve dans ces ridicules structures de laine et de bois qui peuplent l’autel des crédules.
L’été est plein de songes et de promesses, ceux qu’on s’imagine, celles qu’on fait et celles qu’on se fait. Je me suis trop épris des miens, des miennes, de mes chimères et de ces visions chatoyantes, ombres dansantes aussi factices que fuyantes, comme cette paire de jambe lisse et dorée qui défile entre les criques gluantes, et que l’on voit s’éloigner lentement, s’évertuant à sautiller entre les flaques, microcosmes éphémères laissées par le ressac trop pressé de fuir la laideur et l’ennui de cette réalité pour plus vite s’échapper vers ce beau mais mystérieux monde, ces abysses insondables…

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