L’Espagne n’est pas forcément un pays connu pour ses groupes de metal. Il est vrai qu’hormis quelques uns, on ne peut pas dire que les formations hispaniques se démarquent beaucoup à l’international, si ce n’est dans l’univers du thrash qui semble être une prédilection ( du moins un penchant ) : ANGELUS APATRIDA et CRISIX en tête. Mais je ne vais pas m’amuser à vous faire une étude socio-démographique de la musique amplifiée dans la péninsule ibérique, car il y a beaucoup à dire et j’en oublierai certainement de par mon inculture sur le sujet. Toujours est il que le groupe qui nous intéresse aujourd’hui vient lui aussi de La Piel De Toro, plus précisément de Galice, une région plutôt verte, tournée vers l’Océan, peu peuplée et donc assez éloignée des poncifs costa-bravistes.
Composé des intrépides Anxela Baltar et Violeta Mosquera, le duo 100% féminin baptisé BALA est apparu dans nos viseurs suite à sa signature sur le label Century Media Records en début d’année. Aujourd’hui, le groupe nous offre son troisième album en six ans, un album au doux nom de « Maleza », aussi vif, concis et rapide qu’une balle en plein coeur tirée par ce que j’ai envie d’appeler les Thelma & Louise galiciennes, nouvelles égéries du rock espagnol.
En seulement 24 minutes, « Maleza » va nous montrer toute la force et l’envie de BALA. Avec une attitude Do It Yourself qui parlera à tous les enfants des 90’s et du début des années 2000 ( que je suis ), le duo nous transporte tout de suite dans les tendres souvenirs d’un sous-sol garni de boîtes d’oeuf, une Ibanez et un pédalier achetés d’occasion, une batterie aux cymbales fendues et aux baguettes souffrant de panaris. On échange, on crée, on mélange toutes les influences : l’énergie du punk et du rock ( « Hoy No » ou « Mi Orden » ), la lourdeur du stoner et du metal ( « Agitar » ou « Quieres Entrar » ), un peu de NIRVANA, de MELVINS ou de FU MANCHU jusqu’au metal alternatif première génération ( un petit peu de SOULFLY sur « X » pour aller vraiment loin ). Sans se préoccuper du qu’en-dira-t-on, on s’invente, on joue, sans nostalgie, avec le coeur.
Tout en s’ancrant dans la modernité, notamment grâce à un son massif et une belle production, le binôme crée des hymnes à nos amours adolescentes, à ses ambiances skatepark de province, et aux bières bon marché que l’on buvait à la sauvette les mercredis après-midi. Et si de prime abord, BALA semble ne rien inventer, jongler entre le grain grunge, les mélodies rock et l’agressivité métallique n’est pas donné à tout le monde. Rien que dans l’assemblage des vocaux, mi-espagnol mi-anglais, qui vont du cri intense aux chorus mélodiques, le travail de création est impressionnant et chargé des angoisses, des tensions et de la rage des musiciennes. Cela témoigne d’un travail assidu sur la composition afin de rendre l’ensemble simple, cohérent et fluide à l’auditeur. C’est bien plus complexe qu’il n’y paraît quand il est comme ici maîtrisé à la perfection.
Dans l’ensemble, « Maleza » est donc un bel album, fait maison, avec les tripes. Pour sa première sortie sur un grand label, BALA touche la cible et se place tranquillement sur l’échiquier européen, le chargeur plein de « tubes » taillés pour la scène et rendant hommage avec finesse à toute une génération, aux enfants qui ont connu les fourmillements sonores, les balbutiements stylistiques, les foisonnements de mélanges improbables propres aux 90’s.