Napalm Death – chronique – Throes Of Joy In The Jaws Of Defeatism

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“Throes of Joy in the Jaws of Defeatism” NAPALM DEATH – Fondateurs du Grindcore, Royaume-Uni. Sortie prévue via Century Media, le 18 septembre 2020

Dès l’ouverture un vieux riff à la « Scum » résonne, pour montrer les liens évidents entre le passé et le présent – entre la fureur punk hardcore des débuts, retrouvée depuis la renaissance « Enemy Of The Music Business », le respect de la recette sacrée d’antan : le grindcore des familles et les structures expérimentales d’aujourd’hui. Comme quoi un groupe qui exerce une influence majeure depuis les débuts de la scène metal extrême peut faire mieux que se maintenir à flot : proposer une remise en question, une évolution musicale constante en intégrant ses influences – tout créatif n’est-il pas la somme de ses influences ?

Celles des membres de NAPALM DEATH ont toujours été claires et affichées : la scène punk, celle du metal – mais aussi celle du monde interlope du rock indé, de l’industriel et toutes scènes expérimentales et barrées. « Throes Of Joy In The Jaws Of Defeatism » (« Les affres de la joie dans les mâchoires du défaitisme », pour que les choses soient claires…) s’avère donc riche en idées nouvelles, expérimentations, frôlant l’hérésie pour les premiers fidèles s’étant arrêtés aux trois premiers opus des géniteurs du grindcore. Sur 13 titres, atteignant toute de même les 44 minutes, NAPALM DEATH jouera aux montagnes russes avec notre amour pour son côté punitif, quand les guitares ne perdent pas leur instinct de tueurs (les quatre premiers titres de l’album sont là pour vous rassurer de ce côté-là) et leurs désirs insatiables d’expérimentations.  Barney hurle de sa voix rageuse et distordue, ses constats édifiants de misères politiques et sociales – une déshumanisation croissante allant vers la haine de l’autre et sa différence ;  et au vu de l’état de ce monde, il est évident qu’un NAPALM DEATH, affichant cette colombe meurtrie sur sa pochette et les paroles cinglantes de leur hurleur en chef, a tout à fait sa place en 2020.

Les compositions doivent tout à l’écriture de Shane Embury, et pourront être considérée comme son testament musical. Allié du trop discret Danny Herrera qui fait ici un travail digne d’un marathonien olympique – l’intelligence des compositions du bassiste n’a pas cette fois le soutien du riffing abrasif de l’indémodable Mitch Harris, qui a toutefois enregistré les riffs, sur l’insistance touchante de ses compères de toujours.

Alors non, il n’y a pas de « The Wolf I Feed » signé Harris sur cet album – mais l’effort a été clairement fait pour simplifier l’approche du propos – là où le dernier opus « Apex predator – Easy Meat » se perdait avec une production trop ramassée qui venait perturber notre écoute, par manque de clarté, on retrouve un NAPALM en plein efficacité – où même les parties de chant clair paraissent moins lasser (« Contagion » ). Quant à John Cooke, le guitariste des sessions live, il n’a pas eu de place dans les compositions, mais en a joué quelques parties. Shane et Harry se sont souvent partagés à part égale la composition des albums de Napalm Death, une hydre à deux têtes qui se complaitait dans le death old school, le D-beat, la saturation noisy, et l’approche punk susceptibles de satisfaire jusqu’aux fans les plus exigeants. Si Shane se targue le plus souvent d’amener ses compères vers des terres nouvelles, il est aussi le responsable de nouveaux ‘tubes’ du monstre grindcore, on se souviendra des « On The Brink Of Extinction », « Collision Course » ou encore « How The Years Condemn » parmi les titres les plus accrocheurs des trois précédants opus.

Qu’en est-il donc de ces fameuses expérimentations ? Si bien sûr, le blast-beat est de rigueur, cela fait bien longtemps que NAPALM DEATH a continué son chemin en explosant toutes les barrières et frontières musicales. « Throes Of Joy In The Jaws Of Defeatism » explore définitivement aussi de nouveaux territoires, dont le noise-rock. On le sait depuis des années à présent, NAPALM ne tient pas en place, et ce dès le cinquième morceau avec l’étonnante électro déshumanisée, chantée en français (!) : « Joie De Ne Pas Vivre », enrobé d’une basse organique et vibrante, une déroutante intrusion dans l’indus, et le post-punk.  Avec « Invigoratin Clutch », l’introduction nous plonge dans les vieilles racines ayant influencées leur début : AMEBIX, le précurseur du crust-punk britannique, et le riff principal nous fait diablement penser à un mix sorti de la caverne humide d’autres précurseurs CELTIC FROST / HELLHAMMER et les death-metalleux canadiens de SLAUGHTER   « Zero Gravitas Chamber » et « Fluxing Of The Muscle » reprennent la barre un instant, pour remettre le cap vers le grind-hardcore frontal, ce qui redonnera le sourire aux vieux fans du groupe de Birmingham, adeptes des titres brise-nuque. Puis surgit le mi-tempo « Amoral », qui ne se gêne pas pour prendre toutes ses libertés avec le diktat du grindcore, un titre de post-punk – que Shane Embury souligne être un clin d’œil « au son du NAPALM pré-Scum ». Un morceau en toute franchise que l’on aurait préféré retrouver en digital single comme la sympathique reprise de « White Kross » de SONIC YOUTH faite en février dernier – où le chant parlé de Thurston Moore fleurtait avec l’industriel ou l’extrême en tout genre. Avant de nous achever sous un hypnotique morceau « A Bellyful Of Salt & Spleen », dont le son de basse sonne une fois de plus pachydermique, nous retrouvons avec le titre éponyme de l’album et « Acting in Gouged Faith », le NAPALM DEATH vicieux et tellurique pour une dernière envolée hargneuse.

Ici, NAPALM DEATH a donc décidé de jouer avec nos nerfs. Si sous l’étendard noir du groupe, on retrouve toujours cette incroyable capacité à nous offrir des breaks de la mort et une énergie dévastatrice, spécifiquement en live, les Britanniques nous invitent, avec maestria, à l’ouverture musicale, composant en toute honnêteté et courage un album qui ressemble à ce qu’il est en 2020, et il n’est pas certain que vous en trouviez autant parmi tous leurs suiveurs/admirateurs/ copieurs, à travers le monde.

Liens : 

napalm-death-merchandising.com/

centurymedia.com/artist

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