UFOMammut ::: Les Stars de la Space Pop

Sommes-nous tous les héritiers de Pink Floyd et Black Sabbath ? Vaste débat dont on pourrait tirer une thèse à laquelle les space doomers italiens d’UFOMammut y ajouteraient volontiers leur grain de sel. Bien loin des « shiny happy people » des années 60, UFOMammut a développé une musique psychédélique à la croisée de bien des chemins. Lors de notre rencontre au Glaz’art, nous en avons profité pour élucider les mystères de la sphère cosmique dans laquelle ils aiment se perdre et nous avec. Percer quelques secrets cachés de leur alchimie, et percevoir que derrière la porte mystique menant à leur musique, entre amour du son 70’s et New Age, se dissimulent des êtres humains chaleureux.

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Pink Floyd a inventé le Space Rock, Black Sabbath le Doom, de votre côté vous êtes en train d’inventer le Space Doom ?
Urlo (basse, chant): On aime les Beatles aussi, du coup on fait du Space Pop Doom !
Poia (guitar): (Rires) Oui, c’est un honneur, tu viens de citer certains de nos groupes préférés. Quand nous expliquons aux gens la musique que nous jouons, nous leur disons juste que c’est un mélange entre Black Sabbath et Pink Floyd, parce que nous avons ce côté Heavy complémentaire de notre côté spacy. Oui c’est parfait.

Alors va pour le Space Doom ?
Urlo: Personnellement, j’ai du mal à envisager cette histoire de Doom, parce que je ne sais même pas ce que c’est. Il y a tellement de sous-genres. Pourquoi pas du Space Hard Rock pendant que l’on y est? Mais si tu penses que nous faisons du Space Doom alors ça marche, nous te faisons confiance.

Êtes-vous influencés par la mouvance psychédélique, comme par exemple The 13th Floor Elevator? Tout comme eux, vous semblez chercher une nouvelle voie ?
Poia: Je connais ce groupe mais je l’ai découvert très tard. Dans les premiers temps du groupe, nous avons vraiment été influencés par Pink Floyd. Ils étaient le meilleur groupe psyché. Du coup je ne sais pas si nous faisons aujourd’hui quelque chose de vraiment neuf mais en tout cas c’est ce que nous voulons faire. Dans notre musique nous essayons de mettre le meilleur du passé et, disons le, le meilleur d’aujourd’hui. Nous avons été influencés par d’autres groupes comme Three-Five-O-Seven, Loose, les débuts de Moto Psycho ou Monster Magnet, The Melvins, Motörhead. Nous avons en fait de très nombreuses influences. Tu nous as parlé de Black Sabbath et nous des Beatles. Nous pourrions également citer Hawkwind, un autre groupe majeur de Space Rock.
Urlo: D’une certaine manière, nous avons aussi une attitude punk, parce que nous nous foutons de savoir si nous jouons très bien. Nous jouons le plus simplement possible.
Vita (batterie): Ouais, pas de solo…
Urlo: Oui, nous voulons vraiment transmettre quelque chose rapidement et ensuite nous étendre un peu plus sur le sujet. On peut dire d’une certaine manière que nous sommes « punkadelique ». Nos influences fonctionnent bien ensemble.
Vita: Nous essayons toujours d’être nous-mêmes, d’avoir notre propre son mais évidemment nous sommes influencés par le passé.
Poia: Le truc c’est que nous ne sommes pas si doués que ça, donc nous essayons d’obtenir un bon résultat de la manière la plus confortable qui soit pour nous : « Ok, je ne suis pas capable de faire ça, donc autant utiliser ce raccourci pour arriver au même endroit. » [Rires]
Urlo: Nous partageons tous la même notion de ce que sont le bruit, la puissance, la maladie, l’atmosphère psyché, le mal.

Donc vous avez essayé de vous éloigner du psyché des années 60, de tous les clichés Indiens ou de Katmandou, pourtant toutes vos jaquettes ou clips reflètent l’imagerie mystique indienne…
Urlo: D’une certaine manière, les images indiennes rappellent ce qui est magique ou mystique. Certains passages de nos clips comme dans « Lucifer Song » sont vraiment influencés par l’Inde parce qu’un de nos potes est revenu de là-bas avec des vidéos qui justement illustraient parfaitement ce que nous jouions à ce moment là.
Poia: C’est quelque chose qui tient du mantra, un côté très répétitif. Tu entres dans un moment de transe, de conscience pure, c’est une manière de te maintenir en hauteur. C’est aussi lié au mouvement de la terre, à l’esprit de la terre, à la respiration de la terre. C’est très rythmique. En même temps, pour être honnête, nous n’aimons pas être trop « mantriques » parce que nous savons que ça peut devenir ennuyeux. Donc nous devons nous ouvrir à d’autres horizons : « Bon nous sommes là mais nous voulons aller vers un autre aspect de la musique sans toutefois nous répéter». Je connais certains groupes que j’apprécie et qui font la même chose du début à la fin, qui ont le même volume. Pour nous ça ne marche pas comme ça, nous commençons doucement et ça monte, ça monte, et quand tu crois que c’est fini, nous t’emmenons encore plus loin. Selon moi, ce concept a été développé par Kyuss sur le premier morceau de Blues For The Red Sun. La première fois que j’ai entendu cet album je me suis dit « Ok, ça démarre bien! » Le groove est bon, ça commence à monter, ça devient énorme, et tout d’un coup, hop, il double le volume de la musique ! C’est vraiment dans mon esprit, ils m’ont touché et aujourd’hui l’inattendu ça nous plaît, nous aimons surprendre ceux qui nous écoutent.

Dopesmoker de Sleep vous a également influencé ?
Poia: C’est un de mes groupes préférés. Ils étaient très Sabbath, les riffs sonnaient Sabbath et les soli ressemblaient à ceux de Tommy Iommi, mais la perspective était différente. J’aime le jeu de leur batteur, on a l’impression qu’il perd sa rythmique parfois, ça donne un mouvement à la musique que je n’avais jamais entendu avant.

La plupart de vos albums font une heure mais celui-ci, composé comme une saga en deux parties, avoisine les cent minutes. Ne pensez-vous pas que le public va vous trouver trop expansifs ?
Vita: Le nouvel album a des dynamiques différentes. Ça a été une grande découverte pour nous. [Rires] Le même riff a été répété plusieurs fois sur les deux albums mais à travers des rythmes ou des dynamiques différentes.
Poia: C’est vraiment une découverte pour nous la dynamique. Cet élément mystérieux.

Essayez-vous d’apporter une dimension intellectuelle et cosmique à votre musique, un peu comme Pink Floyd le faisait encore une fois ?
Urlo: Nous ne faisons pas que de la musique. Nous essayons de partager un maximum de choses, à commencer par la manière de faire passer la musique sur scène. Nous utilisons beaucoup de projections d’image, et nous considérons un peu ces projections comme le quatrième membre. En fait il ne s’agit pas seulement d’écouter de la musique, il y a autre chose en plus.
Poia: Oui, ça implique plus de sens. Parler d’une dimension intellectuelle me refroidit un peu parce que lorsque j’imagine ça je vois des trucs très arty, très hype. Nous aimons aussi la musique pour ignorant. Nous ne voulons pas passer pour des gars très intelligent, nous avons seulement fait un concept album en deux parties dans lequel nous avons mis beaucoup de consistance. Nous aimons juste nous enflammés parfois, notamment sur des sons très dérangeants. C’est un bon mélange de ce que nous aimerions être: très fins et intellectuels à la fois, mais au final nous ne sommes que des animaux qui jouent de la musique. C’est ça la nouvelle intelligence! (Rires) Nous ne prétendons pas être des intellectuels…
Urlo: Ni des musiciens… [Rires]
Poia: Ça c’est la punk attitude !

Votre imagerie vient du collectif Malleus, dont vous êtes également membres. Comment s’articule votre coopération ? Cela a d’ailleurs commencé sur Lucifer Song si je ne me trompe pas ?
Poia: Nous avons commencé sur notre premier album Godlike Snake qui était sorti sur un label italien et pour lequel nous avions fait nos propres vidéos. Nous aimons gérer tous les aspects de notre musique. Cela part du son mais ça se diffuse à travers les images. Lu est le troisième membre de Malleus, c’est elle qui s’occupe des projections vidéo sur scène. Elle a fait un super boulot depuis Lucifer Song. Aujourd’hui les vidéos sont fantastiques, elles ajoutent de la profondeur au son.
Urlo: Nous ne serions rien sans ces projections ! [Rires]
Poia: Et il y a un autre membre important : Ciccio, notre ingénieur du son à qui nous faisons 100% confiance.

Dans chaque clip d’Oro, une femme alchimique apparaît. Vous semblez obsédés par ce personnage qui était déjà présent sur Idolum et Eve ? C’est une métaphore de l’expansion de la connaissance ?
Poia: C’est possible.
Urlo: C’est plus l’image de la beauté. Dans cet album il y a deux images de femme, une avec des cornes et un troisième œil, l’œil de l’ouverture. L’autre est dans la seconde partie, elle est aveuglée par ses larmes et a un troisième œil au dessus de sa tête. Elle représente la découverte de la connaissance, les étapes du processus alchimique. Dans nos albums, il y a d’autres images de femme, comme sur la couverture de Godlike Snake, avec un organe de femme.
Nous n’avons jamais vraiment lu de livre sur ce sujet, Nous sommes assez ignorants. Le truc à propos de ces maîtresses alchimiques est qu’elles sont au cœur de notre culture. Du coup nous avons décidé d’explorer ça en créant une vision du processus alchimique de la recherche de l’or.
Poia: Les alchimistes étaient les premiers scientifiques. Ils appliquaient les bons procédés, ils n’ont pas atteint la vérité mais ils ont mis en place une manière de réfléchir très importante pour les hommes. Ils ont posé le modèle pour la chimie moderne. Avant tout était lié à Dieu, c’était Dieu qui voulait tout ce qui était, et eux voulaient aller au-delà de ça, ils ont développé les premières méthodes scientifiques. C’est un peu comme quand tu te réveilles après un rêve et que tu cherches la clé pour comprendre ce qui vient de se passer dans ta tête. Ou bien quand tu étais tout petit, enfant et que tu essayais de découvrir et de comprendre le monde par toi-même. Tu veux expérimenter et peut-être écrire tes propres conclusions. Peut-être que tu penses que c’est le soleil qui tourne autour de la terre, mais petit à petit tu découvres la vérité, exactement comme les premiers scientifiques.

Vous avez opté pour des concepts plus froids, plus sombres, ce qui est plutôt rare dans les groupes du sud de l’Europe. Comment en êtes-vous arrivés là ?
Poia: C’est tout simplement ce que nous avons envie d’être et de faire. Nous avons envie de nous éloigner du fameux « sexe, drogues et Rock’n’Roll ». Quand nous montons sur scène, nous essayons d’être différents, hors de la réalité. J’aime bien l’attitude de certains groupes comme AC/DC, Motörhead ou Fu Manchu, ils ont les pieds sur terre, ils vivent dans le moment, ils sont présents au cœur même de l’humanité. Nous sommes pour notre part plus déconnectés de la vie réelle parce que ça pourrait devenir commun et ennuyeux. Si ça marche différemment pour les autres groupes pas de souci, mais nous sommes comme ça.

Est-ce que vous pouvez nous parler de la scène Stoner italienne : Black Rainbow, Stoner Kebab qui semble très Rock’n’Roll selon moi ?
Urlo: Très franchement je n’écoute que peu de Stoner. Je pense qu’il y a de bons groupes comme Morkobot, Incoming Cerebral Overdrive qui ont joué avec nous ce soir, mais je ne vois pas vraiment de scène réelle.
Ciccio: Il y a une scène Indie Rock mais c’est plus du genre « Ouais, on a déjà joué ensemble à tel endroit… »
Poia: Beaucoup de groupes jouent ce genre de Rock psyché inspiré plus ou moins par Kyuss parce qu’ils ont été trop considérés comme les chantres du vrai son. Du coup j’entends trop de groupes avec le même son que Kyuss, mais autant laisser à Kyuss ce qui est à Kyuss, ne pas essayer d’être le prochain Kyuss. Ils sont encore là. Si tu n’es pas dans un groupe de reprise, fais un truc nouveau, trouve ton propre son parce tu as ta voix. C’est souvent une bonne chose de ne pas faire partie d’un genre précis pour essayer de trouver sa propre voie.

Il me reste encore deux questions un peu idiotes !
Ciccio: Les réponses sont « Non » et « Japon » ! [Rires généraux]

Avez-vous utilisé des titres en latin à cause de vos origines italiennes ?
Ciccio: Non
Poia: Japon !
Urlo: Ouais ! Japon !
Poia: Les titres en latin c’est avant tout pour devenir célèbre au Japon ! [Rires généraux]

Ok! Et faites-vous de la musique parce les musiciens sont plus sexys que le commun des mortels ?
Urlo: Nous jouons parce que c’est le seul truc que nous savons faire. Nous ne cherchons pas à être sexy, nous ne sommes pas aussi sexy…
Ciccio, Poia, Urlo : Nous sommes des stars!!!

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