[ Chronique ] MONO – Nowhere Now Here ( Pelagic Records )

image article [ Chronique ] MONO - Nowhere Now Here ( Pelagic Records )

2019 marque le vingtième anniversaire de MONO, deux décennies d’errance musicale et de lutte acharnée sur les sentiers tortueux du post-rock instrumental. Un parcours semé d’embûches dans un style pas facile d’accès qui n’a pourtant pas réussi à décourager nos amis nippons. Taka, Yoda et Tamaki ou la divine trinité mono-lithique ( désormais épaulée du frappeur Dahm ) semble au contraire plus avide que jamais, n’ayant de cesse de parcourir les temples de cultes soniques internationaux pour jouer et re-jouer ses symphonies post-rock si singulières et extatiques.

Ne dérogeant pas à ses principes, le groupe revient avec son imaginarium complexe fait de guitares aériennes tissées sur des rythmiques organiques, une véritable expérience que l’on attendait avec une certaine impatience… Ce nouveau palais sonore se nomme « Nowhere Now Here » et est clairement une porte ouverte sur les mondes de MONO, le bon moyen de tomber amoureux d’un groupe aussi unique que la musique qu’il propose.

Au début, il y a des ruisseaux scintillants de mélodies nébuleuses, presque insignifiantes. De ses minces filets,  MONO fait jaillir des raz-de-marée d’émotions, et bientôt les sonorités cinématographiques fluides emplissent les vides, comblent chaque intervalles, les abreuvant de sensations. D’un titre à l’autre, on regarde les gouttes de pluie tapoter, puis dégouliner lentement sur les fenêtres pour finir par comprendre que c’est sur nos yeux embués, sur nos joues tiédies que les larmes roulent.

Parfois, au sein d’une linéarité ou d’une répétition, les atmosphères se mêlent, un souffle froid nous fait ressentir une mélancolie chaude, nous plonge en apnée puis nous offre une respiration salvatrice, soutenue par des cordes et des vents, les battements organiques d’un cœur. Au détour d’un mouvement bourrasqueux, comme une buée vocale, la voix de Tamaki se pose en témoin. Rare murmure de l’entité MONO qui agit comme un démiurge fantomatique, un constructeur de l’imaginaire muet qui garde ainsi l’immersion sensorielle intacte.

Pour tout ça et pour bien d’autres choses que vous découvrirez par vous-même, « Nowhere Now Here » est donc un endroit incroyable où les images se multiplient, se segmentent, se fondent et se confondent. Il est un ensemble, une rhapsodie maussade et cinématographique qui capture l’oreille et laisse l’imagination se déchaîner en sentiments sinusoïdaux. MONO parle au cerveau cordial, au coeur cérébral ( à vous de voir ), il gomme les frontières et nous force à échapper à la réalité et à cette notion trop humaine de temporalité ; nous laissant ici ou ailleurs, juste vivant, en suspend.

Partager