ULVER – The Assassination of Julius Caesar ( House Of Mythology )

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Malgré sa longévité et sa nature prolifique, je dois admettre que la carrière d’ULVER reste en grande partie un mystère. L’on dit que l’humain n’utilise que 20% de ses capacités cérébrales et, bien souvent, il en est de même de ses capacités dites musicales. ULVER, quant à lui, met un point d’honneur à utiliser tout les moyens lui permettant d’arriver à ses fins. En conséquence, suivre sa carrière suppose un lourd investissement de la part de l’auditeur tant la « meute » se voit capable de rebondissements et de brusques changements de direction dans une volonté de constante et libre évolution.

Quand on écoute le travail qu’a produit cette entité norvégienne depuis quelques années, il est étonnant de penser que le groupe a commencé sa carrière en tant que pionnier du black à tendance folklorique. Et pourtant, force est de constater qu’ULVER en a fini avec les trolls et le métal noir, et ce depuis près de vingt ans. Comme hors de tous courants, ULVER a accepté les autres styles, les a assimilé et a activement travaillé à s’engager vers d’autres directions tout en donnant sa propre interprétation de la musique. De fait, l’expérience ( car il s’agit bien à chaque fois d’une expérience ) d’un nouvel album d’ ULVER ne peut jamais être vraiment comparée à celle de ses prédécesseurs ou encore limitée par des influences identifiables ( même si indéniablement, influences il y a ). La meute se voulant bien trop rusée et sournoise pour cela.

Donc, lorsque je reçois « The Assassination of Julius Caesar », je me dis bêtement que le groupe s’est décidé à sortir une oeuvre type péplum avec tout ce qui va avec, le côté grandiloquent et l’orchestration hollywoodienne de rigueur. Et bien évidemment ULVER m’a pris à contre-pied,  ce n’est pas du tout mais pas du tout ce à quoi je m’attendais. Ce que nous avons ici est, selon leurs propres mots, l’album « pop » du groupe… Prenons tout de même cette déclaration avec des pincettes car il faudrait déjà savoir ce que signifie  le terme « pop » pour ULVER.

J’ai donc passé pas mal de temps à écouter cet album avant d’arriver à le digérer et à en ressortir quelque chose. ULVER, toujours aussi pointu dans ce qu’il fait, joue implacablement avec des thèmes qu’il connaît et maîtrise. Il prend l’auditeur et le mène sur les chemins musicaux qui ont trait à la pop et à l’électronique des années 80. L’album est très agréable en surface, relativement doux avec cette voix chaude, pénétrante et suave, presque sensuelle, de l’emblématique Kristoffer Rygg. Les refrains et les chœurs sont accrocheurs, les beats totalement électro en deviennent même, par moment, presque dansants.

Mais les titres ont une résonance plus profonde qu’il n’y parait, le groupe peignant différents paysages avec pour toile de fond cette espèce de pop éléctro-synthétique. On se situe entre les travaux industriel d’un NIN mêlés à un DEPECHE MODE quelque peu dépoussiéré. Rien de très expérimental en somme, on reste dans quelque chose de familier, de facilement assimilable même si riche en nuances. Bien que « The Assassination of Julius Caesar » soit relativement minimaliste dans sa composition, il réussit pourtant le pari de nous transposer dans un univers pop ( chose dont je ne suis pas adepte ), mais bien loin des saveurs acidulo-édulcorées de cette musique populaire, ULVER s’ amuse avec sérieux, se joue du style en manipulant le contexte émotionnel le tout sur un beat electro rituel. Il y fait se jouer drames et actions, sentiments profonds et mélancolies, il y apporte sa patte et arrive ainsi à faire vibrer une corde sensiblement différente à nos oreilles. Même si en effet être évocateur avec de la musique « pop » n’est pas une tâche trop ardue, le faire intelligemment et réussir à en varier les plaisirs en est une autre.

Je dirai que « The Assassination of Julius Caesar » , même si il est une fois de plus déroutant, est loin d’être un mauvais album, mais au final je ne sais pas trop quoi en penser, j’ai vécu son écoute comme une sorte de plaisir coupable, car parfois séduit et envoûté par certains titres et mélodies qui auraient très bien pu se retrouver sur un album d’une quelconque tanche mainstream. Cet album réaffirme en tout cas l’unicité d’ULVER et prouve qu’il utilise tout ce que la musique lui offre pour exprimer son art et sa pensée. Il fera sûrement encore hurler les détracteurs et autres réactionnaires de tous bords. Personnellement je ne vois dans cette oeuvre que la vision musicale d’artistes libres et accomplis.

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